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Kelsey Shwetz “Pale Slope of The Hour” Galerie Julien Cadet : Entre mythe et réalité, l’interview exclusive

Date : 16 avril 2023
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“Je souhaitais créer un Show très narratif…” – Rencontre avec Kelsey Shwetz à l’occasion de son Solo Show “Pale Slope of The Hour” au sein de la Galerie Julien Cadet : Entre mythe et réalité, immersion.

Tout d’abord, pouvez-vous vous présenter, vous et votre univers ?

Hi! Je suis Kelsey Shwetz, et bienvenue dans l’univers de mes oeuvres. Le monde que je construis à travers mes tableaux m’est avant tout profondément familier. Chaque type de roche, de plante, de coucher de soleil, de ciel, d’étendue d’eau et d’intérieurs que vous pouvez apercevoir sont des paysages que j’ai pu observer, expérimenter et photographier. À cela s’ajoute ce jeu de juxtaposition d’espaces créant cette dimension surnaturelle : mon objectif est de rassembler plusieurs mondes qui m’inspirent tels que celui de l’architecture, de la nature et de la mythologie. Par exemple, sur la toile Seed of Desire, (cf photo ci-dessous) le ciel semble prendre cette allure cristallisée. Elle fait référence à ce que j’ai nommé  ‘grotte gothique’ : l’allure des formes prises par les grottes préhistoriques au fil du temps me fait penser à celles des cathédrales gothiques ; c’est cette remarque qui m’a menée à imaginer la relation entre la nature et la façon dont nous essayons de la représenter à travers l’architecture et comment tout cela finit par s’entremêler.


Kelsey Shwetz – Seed of Desire – 2022

Pendant votre enfance, quelle était votre relation à l’art ? Quel a été l’événement majeur qui, selon vous, a créé votre identité ?

C’est une très bonne question. J’ai suivi une formation de psychologie et cela a certainement son influence au cœur de mes oeuvre : ces paysages et ces intérieurs sont avant tout des espaces psychologiques, ce sont ces lieux qui existent principalement au sein de mes pensées et que je projète ainsi sur mes toiles. 

Concernant un évènement en particulier, je dirais que c’était à l’école, en cours d’art plastique. Un jour où nous sommes allés au sein de ce conservatoire botanique au Canada, là où j’ai grandi, pour dessiner. C’était la première fois que je me trouvais dans un environnement aussi particulier avec des plantes complètement inhabituelles autour de moi, ces plantes qui, pourtant, n’étaient pas indigènes au Canada. Cela m’a en quelque sorte ouvert l’esprit sur le fait que j’étais là, au Canada, que je connaissais ces arbres et ces plantes et que, pourtant, je vivais dans ce bâtiment, cet espace fermé en verre, entourée d’un paysage complètement différent, et je me demandais : Comment est-ce possible ? 

Je pense que cela a été la première étincelle, ouvrant ainsi sur cette possibilité d’imaginer des paysages qui étaient réels mais de pouvoir les faire aller au delà de mon expérience propre. Ensuite, au fil des années, en exerçant et en créant ainsi ma propre mythologie, en m’inspirant de la religion avec laquelle j’ai grandi, des histoires et images que j’ai pu intérioriser, j’ai réfléchi à la façon dont je pourrais rassembler le tout et j’ai ainsi décidé de commencer au sein de mon appartement… En bref, il y a ces moments de vie qui m’ont emmené à devenir peintre. Lorsque je peins, je redécouvre l’instabilité de ces moments à la fois familiers et méconnaissables qui auront été très fructueux dans l’élaboration de mon univers. 

Pouvez-vous décrire votre processus de création ?  

Avant une oeuvre, je prends toujours des photos de référence. A chaque fois que je voyage quelque part, mon premier arrêt est le Conservatoire. J’étais à Londres, juste avant de venir à Paris pour l’inauguration de mon Solo Show chez Julien Cadet, et j’ai pris une tonne de photos et donc de références. Avec toutes les données qui nous entourent et que nous ingérons, j’ai toujours cette impression qu’il y a une période de gestation, qui peut durer 6 ou 9 mois, pendant laquelle vous voyez quelque chose et vous vous y sentez attiré pour une raison ou une autre, mais vous avez besoin d’un peu de temps pour la traiter, la métaboliser. 

Mon processus commence donc par ces photos. Ensuite, quand j’ai une idée pour une peinture, je fais un dessin très libre. Ma peinture, que vous pouvez voir ici, est elle très légère et très précise quand les dessins, eux, sont complètement bruts, sur du papier sale, sans crayon précieux, ils sont rapides, et ne sont que des lignes. Ils sont là pour faire sortir cette idée qui n’existe encore que dans mon esprit. Après, je fais une étude de couleur et ce, sur une petite peinture. Dans mon exposition, vous pouvez découvrir deux petits formats qui illustrent cette phase là, lorsque je travaille sur la composition des couleurs. Par exemple, sur Procession, (cf photo ci-dessous) c’est un paysage dans le Vermont que j’ai photographié. J’ai été inspirée par sa lumière, ses couleurs et j’ai ainsi créer cette palette de nuances exclusive à cette oeuvre.

Mes peintures sont développées à partir de mes observations, donc même si le sujet peut être un peu rêveur, abstrait, il est dérivé de choses que j’ai observées dans mon appartement. Un jour, j’ai réglé mon alarme et je me suis réveillée à l’aube afin d’étudier et comprendre la lumière au sein de mon intérieur et j’ai réalisé que beaucoup de choses que je pensais être juste vertes ou bleues avaient une couleur différente à ce moment de la journée qu’elles ne l’auraient été le soir par exemple. À partir de là, je réalise mon tableau en me basant sur le croquis et sur les études de couleurs que j’aurais effectuées. 

Kelsey Shwetz – Procession – 2022

En parcourant l’exposition, nous avons l’impression d’assister à une véritable scénographie, cette sensation d’être en immersion au sein d’un monde magique et fictif mélangé à notre réalité moderne, et puis il y a ces personnages, ces animaux et même objets  qui apparaissent et laissent leurs traces… Pouvez-vous nous en dire plus sur ces figures ?

Le mythe fait partie intégrante de mon travail. Lorsque je fais mes recherches, je réfléchis aux mythes avec lesquels j’ai grandi et à la mythologie en général. J’en suis venue à la conclusion qu’ils tournaient souvent autour d’objets spécifiques utiles et connus du quotidien, des choses que nous utilisons, tels que les coupes, les calices, ces bols souvent protagonistes de ces mythes, des choses que nous consommons tels que les fruits, l’eau, mais aussi certains animaux. 

J’ai ainsi ressenti une immense distance par rapport à ces mythes anciens : dans notre monde contemporain, nous utilisons toujours tous ces objets, mais nous ne les inscrivons pas nécessairement comme dans les mythes. Même si il semble y avoir un regain d’intérêt pour le tarot, l’astrologie et la mythologie, je pense que nous nous sommes éloignés de l’émerveillement et de la curiosité pour le monde naturel, celui qui nous entoure. Mon travail est une tentative de se sentir peut-être plus connecté au monde que nous habitons et aux objets avec lesquels nous passons notre vie au lieu de les considérer simplement comme des objets de consommation avec une relation significative. C’est dans cet esprit que j’ai commencé à observer mon appartement et à me demander quels sont les objets qui, pour une raison ou une autre, sont chargés d’énergie. Par exemple, j’ai choisi ce pot de fleurs, ce vase qui ressemble à un chat, fabriquer un pot de fleurs pour qu’il ressemble à un chat, c’est ce désir profond d’être entouré d’animaux et de nature. Si nous avons une fausse plante en pot ou un fruit en plastique dans un bol sur la table, c’est ce genre d’aspiration ou de désir qui nous relie à la nature, mais nous n’avons cependant pas à arroser la plante, ni à nous inquiéter que le fruit pourrisse, ni à nourrir le chat. 

Aussi, dans les mythes et histoires, plusieurs mondes peuvent exister sur un même plan, contrairement à notre réalité éveillée. C’est ce qui se passe dans les rêves, où de nombreuses choses se produisent en même temps, et ce, comme dans certaines de mes peintures. Je tenais à évoquer cette réalité multiple, comme cette cathédrale dans cet appartement dans Dawn’s First Light (Revenge) – (cf photo ci-dessous) dans mon rêve, je suis au coeur de ces deux univers au même moment et cela me semble très réel. C’est une sensation très intéressante à explorer dans la peinture. C’est excitant d’être peintre : on peut être dans plus d’un endroit à la fois, que ce soit dans le temps, dans un rêve, dans la vie éveillée, dans un espace artificiel et/ou naturel, et je pense que combler le fossé entre ces différents environnements est très excitant. 

Kelsey Shwetz – Dawn’s First Light (Revenge) – 2023

Il y a ce véritable jeu de techniques et de styles dans vos travaux, souligné par ces couleurs vibrantes et ces jeux de lumière puissants, certaines parties apparaissent plus définies que d’autres… Quel est l’effet que vous souhaitez partager avec vos spectateurs ?

Prenons l’exemple du tableau Fruit to Glass (cf photo ci-dessous). Au sein de chaque oeuvre, j’aime mélanger plusieurs languages. Ainsi, dans certaines parties du tableau, il y a cette allure très réaliste, et sur d’autres, à quelques millimètres de distance, la peinture redevient de la peinture et vous pouvez juste la sentir comme telle. La texture est également quelque chose avec laquelle j’aime jouer : ainsi le ciel est très plat, puis lorsque vous arrivez à l’espace rocheux, vous remarquez un peu plus de texture… Ce à quoi je pensais, lorsque je prenais ces décisions d’effets, c’est à cette idée d’être dans ce grand espace, de regarder un élément et de se concentrer sur ce dernier. Il vous apparait alors très distinctement, quand tout le reste se fond dans la périphérie. C’est cette idée que je souhaite refléter dans mes peintures, il y a à la fois ces espaces flous et ces espaces très nets, et je pense que cela change en fonction de ce à quoi vous pensez, de votre humeur et de là où vous vous trouvez dans la pièce. Je tiens à ce que ma peinture comprenne tous ces modes de perception sensorielle. La plupart du temps, le sujet auquel je pense vient de ma mémoire, qui peut intrinsèquement être floue, quand certaines images apparaissent très nettes et je ne sais pas exactement pourquoi elles sont nettes et d’autres plus abstraites, mais c’est aussi cette expérience que je souhaite partager. 

Kelsey Shwetz – Fruit to Glass – 2023

Avec quel artiste choisiriez-vous de dîner ?

J’adore cette question. Je viens toujours à imaginer exhumer cet artiste d’entre les morts et ainsi me demander si nous dînons à son époque ou à la mienne, s’il va être désorienté ou si je vais moi-même l’être… Ma réponse serait Joachim Patinir, un peintre néerlandais du XVe siècle qui, à mon avis, a été l’un des premiers véritables peintres paysagistes. À son époque, il se devait de peindre des histoires religieuses mais il a aussi réalisé de merveilleuses peintures de paysages qui semblent si vivantes que le ciel et les rochers deviennent protagonistes. Il y a ces petits personnages qu’il a été forcé de peindre tels des figurines, suivant l’histoire biblique, mais en réalité, c’est le ciel qui suscite véritablement l’attention du spectateur. Quand je l’ai découvert pour la première fois, il m’a en quelque sorte ouvert l’esprit sur cette idée de paysage figuratif. J’aimerais beaucoup échanger avec lui sur ce que c’était que de composer ainsi à cette époque, mais aussi sur ces techniques de peinture qui transmettent cette sensation que les cieux et rochers respirent et bougent, et ainsi de croire que ces derniers ont plus de personnalité que les protagonistes peints. C’était vraiment une idée nouvelle.

Kelsey Shwetz – Night (The Reach) – 2022

Si vous deviez citer un livre ? Un film ?

Un livre qui m’a inspiré : If Not, Winter: Fragments of Sappho d’Anne Carson. Non seulement car c’est un texte magnifique, mais aussi car il y a une véritable attention aux écritures, papyrus retrouvés dans le temps. Lorsque Carson ne peut déchiffrer le texte, elle laisse ces espaces, tels que des parenthèses et le spectateur est censé les remplir avec du silence, une pause ou avec sa propre idée de la narration et je pense que cela a été une grande source d’inspiration au cœur de mon travail : une grande part de ce à quoi je pense apparait subtilement entre la réalisation de mes différentes toiles, qui est aussi cet espace blanc, cet espace vide qui ne l’est pas vraiment au final car il est toujours rempli de perceptions, de pensées et des récits internes du spectateur. J’ai toujours tenu à ce que mes expositions soient une sorte de collaboration entre l’artiste et ses visiteurs, une collaboration où j’apporte une moitié et eux cette autre qui s’installe dans l’espace blanc, entre les peintures. C’est ainsi que ce livre a été une énorme source d’inspiration pour moi, tant sur le plan formel que spirituel.

Le film qui m’a le plus inspiré : Marie Antoinette de Sofia Coppola. Premièrement pour la densité formelle, les couleurs et la lumière du film en lui-même, mais aussi car les dialogues sont très rares malgré une histoire très narrative, on a l’impression que l’histoire n’est pas guidée par les paroles de ses protagonistes mais par son environnement et les energies évoquées, et je pense que le film et la peinture ont cette relation analogue. J’aime cette idée de créer une histoire profondément narrative par les sens. Je pense que ce film est né d’un excellent travail de sens, grâce à la musique, à la lumière, aux costumes et à la forme, pour faire avancer le spectateur sur une piste narrative très connue, mais d’une manière différente, et j’espère que les œuvres de cette exposition transmettront à ses spectateurs quelque chose de similaire.

Crédits Photos – ©THOMAS MARRONI

Galerie Julein Cadet – 13 rue Béranger 75003 Paris

https://www.galeriejuliencadet.com/paleslopeofthehour

Kelsey Shwetz & Sarah Heitzmann à la Galerie Julien Cadet lors de l’exposition « Pale Slope of the Hour ».

ENGLISH VERSION

First of all, could you present yourself and your universe?

Hi, I’m Kelsey Shwetz, and welcome to the world of my paintings. The world I build through my paintings is, above all, deeply familiar to me. Every type of rock, plant, sunset, sky, body of water, and interior you see is a landscape I have observed, experienced, and photographed. In addition, the juxtaposition of spaces creates a supernatural dimension: my aim is to bring together several universes that inspire me, such as architecture, nature and mythology. For example, in the painting Seed of Desire, (see photo below) the sky seems to take on this crystallised appearance. It refers to what I have called the ‘gothic cave’: the way prehistoric caves look over time reminds me of gothic cathedrals; it is this observation that led me to imagine the relationship between nature and the way we try to represent it through architecture and how it all ends up intertwined.

Growing up, what was your relationship to art? What was the major event that created your identity?

That’s a very good question. I have been studying psychology and this certainly has its influence in the heart of my work: these landscapes and interiors are above all psychological spaces, these are the places that first exist within my thoughts and that I project onto my canvases. 

Concerning a particular event, I would say that it was at school, in art class. One day we went to this botanical conservatory in Canada, where I grew up, to draw. It was the first time I was in such a special environment with completely unusual plants around me, plants that were not indigenous to Canada. It kind of opened my mind to the fact that I’m here in Canada, that I know these trees and plants, and yet I’m living in this building, this glass enclosed space, surrounded by a completely different landscape, and I was like, how is this possible? 

I think that was the first spark, opening up this possibility of imagining landscapes that were real but being able to take them beyond my own experience. Then, over the years, as I practiced and created my own mythology, inspired by the religion I grew up with, the stories and images I was able to internalize, I thought about how I could put it all together and so I decided to start in my apartment… In short, there are these moments in life that led me to become a painter. When I paint, I rediscover the instability of these moments, both familiar and unrecognizable, which have been very fruitful in the development of my universe.

Could you describe your creation process ?

Before a painting, I always have photos of references. Whenever I travel somewhere, my first stop is the Conservatory. I was in London just before coming to Paris for the opening of my Solo Show at Julien Cadet, and I took a ton of photos and therefore references. With all the data that surrounds us and that we ingest, I always have this feeling that there is a gestation period, which can last 6 or 9 months, during which you see something and you feel attracted to it for some reason, but you need some time to process it, to metabolize it. 

So my process starts with those pictures. Then, when I have an idea for a painting, I make a very loose drawing. My painting, which you can see here, is very light and very precise, whereas the drawings are completely raw, on dirty paper, without any precious pencil, they are quick, and they are only lines. They are there to bring out this idea that still exists only in my mind. Afterwards, I make a color study on a small painting. In the Show, you can discover two small formats that illustrate this phase, when I work on the composition of colors. For example, on Procession, (see photo below) it is a landscape in Vermont that I photographed. I was inspired by its light, its colors and I created this palette of nuances exclusive to this work.

My paintings are developed from my observations, so while the subject matter may be a bit dreamy, abstract, it is derived from things I observed in my apartment. One day I set my alarm and woke up at dawn to study and understand the light within my home and realized that many things that I thought were just green or blue were a different color at that time of day than they would have been at night for example. From there, I create my painting based on the sketch and the color studies I would have done.

Throughout your exhibition, we have this feeling of witnessing a real scenography, this feeling of being immersed in a magical and fictitious world mixed with our modern reality, and then there are these characters, these animals, and even objects that appear and leave their traces … Can you tell us more about these figures?

Myth is an integral part of my work. When I do my research, I reflect on the myths I grew up with and mythology in general. I have come to the conclusion that they often revolve around specific objects that are useful and known in everyday life, things that we use, such as cups, chalices, these bowls that are often the protagonists of these myths, things that we consume such as fruits, water, but also certain animals. I felt an immense distance from these ancient myths;

In our contemporary world, we still use all these objects, but we don’t necessarily inscribe them like in the myths. Even though there seems to be a resurgence of interest in tarot, astrology and mythology, I think we have moved away from the wonder and curiosity of the natural world, the world around us. My work is an attempt to perhaps feel more connected to the world we inhabit and the objects we spend our lives with instead of simply seeing them as consumer objects with a meaningful relationship. With this in mindset, I began to look around my apartment and ask myself which objects, for whatever reason, are charged with energy. For example, I chose this flower pot, this vase that looks like a cat, making a flower pot to look like a cat is this deep desire to be surrounded by animals and nature. If we have a fake potted plant or a plastic fruit in a bowl on the table, it is this kind of longing or desire that connects us to nature, but we don’t have to water the plant, or worry about the fruit rotting, or feed the cat. 

Also, in myths and stories, several worlds can exist on the same plane, unlike our waking reality. This is what happens in dreams, where many things happen at the same time, as in some of my paintings. I wanted to evoke this multiple reality, like this cathedral and in this apartment in Dawn’s First Light (Revenge) – (see photo below) in my dream, I am in the heart of both worlds at the same time and it feels truly real. It’s an interesting feeling to explore in painting. It’s exciting to be a painter: you can be in more than one place at the same time, whether it’s in time, in a dream, in waking life, in an artificial and/or natural space, and I think bridging the gap between these different environments is very exciting.

There is this real interplay of techniques and styles in your work, underscored by these vibrant colors and powerful light games, some parts appear more defined than others… What is the effect you want to share with your viewers?

Let’s take the example of the painting Fruit to Glass (see photo below). Within each work, I like to mix several languages. So in some parts of the painting there is this very realistic look, and in others, a few millimeters away, the paint becomes paint again and you can just feel it as such. Texture is also something I like to play with: so the sky is very flat, and then when you get to the rocky space, you notice a little bit more texture… What I was thinking about, when I was making these effect decisions, is this idea of being in this big space, looking at an element and focusing on it. Then it comes to you very distinctly, when everything else blends into the periphery. That’s the idea I want to reflect in my paintings, there are both these blurry spaces and these very sharp spaces, and I think that changes depending on what you’re thinking about, what your headspace is and where you are in the room. I want my painting to include all of these modes of sensory perception. Most of the time the subject matter I’m thinking about comes from my memory, which can inherently be fuzzy, when some images appear very sharp and I’m not sure why they’re sharp and others more abstract, but that’s also the experience I want to share.

Which artist would you choose to dine with?

I love this question. I always come to imagine exhuming this artist from the dead and thus wonder if we are dining in their time or in ours, if they will be disoriented or if I will be myself… My answer would be Joachim Patinir, a Dutch painter of the 15th century who, in my opinion, was one of the first true landscape painter. In his time, he had to paint religious stories but he also made wonderful landscape paintings that seem so alive that the sky and the rocks become protagonists. There are these little figures that he was forced to paint like figurines, following the biblical story, but in reality, it is the sky that really captures the viewer’s attention. When I first discovered him, he kind of opened my mind to this idea of figurative landscape. I would love to talk to him about what it was like to compose like that at that time, but also about these painting techniques that convey this feeling that the skies and rocks breathe and move, and thus believe that they have more personality than the painted protagonists. It was really a new idea.

If you had to quote a book? A movie?

One book that inspired me was If Not, Winter: Fragments of Sappho by Anne Carson. Not only because it is a beautiful text, but also because there is a real attention to the writing, papyrus found in time. When Carson can’t decipher the text, she leaves these spaces, like parentheses, and the viewer is supposed to fill them with silence, a pause, or with their own idea of narrative, and I think that’s been a big inspiration in the heart of my work: a lot of what I think about appears subtly between the making of my different paintings, which is also this white space, this empty space that isn’t really empty in the end because it’s always filled with perceptions, thoughts, and the viewer’s own inner narratives. I have always wanted my exhibitions to be a kind of collaboration between the artist and their visitors, a collaboration where I bring one half and they brings the other half that settles in the white space, between the paintings. So this book has been a huge inspiration for me, both formally and spiritually.

The film that inspired me the most was Marie Antoinette by Cynthia Kaplan. First of all for the formal density, the colors and the light of the film itself, but also because the dialogues are very rare despite a very narrative story, one has the impression that the story is not guided by the words of its protagonists but by its environment and the energies evoked, and I think that film and painting have this analogous relationship. I like this idea of creating a deeply narrative story through the senses. I think this film was born out of a great work of sense, through music, light, costume and form, to take the viewer down a very familiar narrative path, but in a different way, and I hope the works in this exhibition will convey something similar to its viewers.

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