Organisé par l’incubateur de talents, le Darmo Art Prize récompense et met en lumière de jeunes artistes, en les accompagnant dans leur développement à l’internationale.
Humberto Poblete-Bustamante : ‘Flat totem for Orgasmic Freedoms and Other Seeds’ – Solo Show à la Galerie Julien Cadet – L’interview exclusive
Rendez-vous au sein de la Galerie Julien Cadet en l’honneur du Solo Show de l’artiste chilien Humberto Poblete-Bustamante pour une interview exclusive – ‘Flat totem for Orgasmic Freedoms and Other Seeds’, l’exposition évènement à découvrir au coeur du 3ème arrondissement de Paris jusqu’au 11 Mars prochain.
« Humberto Poblete-Bustamante nous pousse à changer notre regard et à bouleverser nos attentes. Flat Totems for Orgasmic Freedoms and Other Seeds est une plongée au cœur d’une peinture instinctive, absolue et vivante. »
– Boris Bergmann, écrivain, au sujet d’Humberto Poblete-Bustamante.
En grandissant, quelle a été votre relation, votre expérience avec l’art ?
C’est une longue histoire. Mon père était peintre. Je viens d’une famille d’artistes : une soeur actrice, un frère écrivain, peignant aussi, un autre architecte, des cousins danseurs, acteurs… J’ai toute ma vie baigné dans un univers créatif, la peinture m’est ainsi venue naturellement. Adolescent, cela devient cependant quelque chose de désagréable, car l’on se demande si c’est finalement véritablement notre histoire ou si l’on suit un chemin préconçu. J’ai donc vécu cette phase de refus de la peinture durant laquelle j’ai cherché à m’épanouir dans le théâtre. Cependant le dessin restait au centre de ma routine journalière, j’avais besoin de m’y retrouver et l’aspect collectif du théâtre devenait lourd. Je restais passionné par l’impact propre de la peinture. L’impact émotionnel sûrement, mais je ne veux pas le qualifier.
J’étais dans une école d’art alternatif au Chili, à une période de dictature fasciste au sein de laquelle résignait cette opposition politique, qui était très intéressante. Dans les années 80, il y avait cet art très pulsionnel, notamment par la reconnaissante des graffitis, c’était un nouveau langage artistique, une énergie très expressive. Le Chili, dû à la situation politique, est un pays où l’art conceptuel est très important. Ma génération fut la première à souhaiter s’émanciper au delà des perspectives politiques.
Votre inspiration majeure ?
Mes enfants. Ma femme. La galerie. Julien (Julien Cadet, galeriste, ndlr) -rire-. Ces présences fortes m’influencent. Je peins pour mon monde, donc très peu de monde au final, je ne peins pas pour l’humanité. Tu peins pour ces personnes que tu aimes, qui t’inspirent, car ce sont les interactions avec ces personnes qui sont cultivées, qui se transforment en langage au coeur de la création. C’est comme une communion entre ces acteurs.
Vous avez dit « Le cerveau est une machine mortuaire », que voulez-vous dire par cela et comment cette affirmation a influencé votre travail ?
C’est la base de mon travail. J’ai mis des années à le comprendre. Le mécanisme du cerveau m’intrigue. Ce que j’ai réalisé, c’est que le cerveau cherche à éloigner les problèmes qu’apporte la vie, ils les archive, trouve des solutions. Ton cerveau a un objectif et il va ainsi chercher à agir de la manière la plus simple, la moins dangereuse, la plus logique vers ce but. C’est cette grande marche impéccable, idéale vers la mort qui cherche à être réalisée, et c’est ainsi que le cerveau est cette machine mortuaire. On pourrait ainsi se demander si, au final, chercher la liberté, ce ne serait pas de s’opposer à son propre cerveau ?
Et dans la peinture donc, j’ai commencé à comprendre que dès que je commençais à réaliser une forme dont je connaissais préalablement la perspective, un carré par exemple, ce dernier prenait une allure différente en fonction de plusieurs évènements ou situations indépendants de ma pensée. Dans mon travail, j’essaie le plus possible de laisser vivre ces incidents, erreurs ou imperfections en dehors de cet idéal qu’installe mon cerveau. Cela représente la vie; l’erreur, c’est vivre; l’erreur, c’est la peinture. La toile finie, c’est la somme de tous ces accidents.
Le mouvement semble primordial dans votre travail, les lignes et formes semblent s’émanciper éternellement, comment travaillez-vous un tel effet ? Pouvez-vous nous décrire votre processus créatif ?
Il a été très important dans ma carrière d’éliminer tout effet. Je ne cherche pas l’effet technique. Ma technique est simple, elle exprime simplement mon état émotionnel. C’est comme la danse, je ne souhaite pas jouer sur une technique, je souhaite juste danser, selon mon ressenti, mes émotions, mon rythme intérieur.
Je ne me souviens jamais de par où j’ai commencé à peindre. Mes émotions ont tellement guidé mes gestes, ce n’est pas mécanique. Mes toiles ne sont pas calculées, à un moment donné, ce n’est plus moi qui exécute, je réponds à des situations. Je ne fais pas d’esquisse avant mes travaux. C’est un dialogue de sensations. Je change, j’efface, j’ajoute, je surpasse. Je m’écoute.
Les inscriptions que l’on peut trouver sur le côté de mes toiles, peuvent être le titre d’une chanson que j’écoutais au même moment, où une phrase entendue, ou une pensée, tout simplement.
Avez quel(s) artiste(s), mort of vivant, choisiriez-vous de dîner ?
Tiziano Vecellio, Diego Velazquez, un indien, mes enfants.
Un livre ou un film ?
J’y pensais récemment. Un livre qui m’a beaucoup influencé, c’est Demian de Hermann Hesse, c’est l’histoire d’un jeune garçon qui prend connaissance du don qu’il possède : la puissance de sa pensée.
Un film? Andrei Roublev d’Andrei Tarkovski, un long film de 3h sur la Russie médiévale.
Galerie Julien Cadet
13 rue Béranger 75003 Paris
Ouvert du Mercredi au Samedi.